Déceler les pépites de demain
Alors qu’une nouvelle crise politique s’ajoute aux crises géopolitiques et budgétaires, une diversification maximale s’impose dans les portefeuilles des épargnants.
1) Le CAC 40 flirte avec les 8 000 points. Faut-il s’en inquiéter ? Quel bilan tirer de ce premier semestre ?
Il n’y a pas lieu de s’inquiéter d’un indice qui bat des records. Je crois même qu’il faut se réjouir que le CAC40 atteigne de nouveaux records car c’est le reflet de la performance des 40 plus belles entreprises françaises cotées. Cela veut dire qu’elles sont bien gérées et sont en croissance. C’est un constat positif pour notre économie. Ceci dit, ces hausses sont très disparates selon les secteurs. Le CAC 40 a surtout été porté depuis le 1er janvier par le secteur financier à l’image de la Société Générale dont le cours s’est envolé de 113%. Les autres contributeurs à la hausse ont été Safran +39%, Legrand +40%, Vinci +29%. A l’inverse, le secteur du luxe a pesé sur la performance de l’indice avec la baisse des leaders comme LVMH -22% ou Hermès -10%.
La question qui inquiète désormais les investisseurs n’est pas la valorisation de l’indice phare parisien mais la situation politique de la France qui pourrait se retrouver bientôt sans gouvernement. La volatilité du marché français va rester élevée et l’incertitude va augmenter. Ça n’est pas une bonne chose et la prudence s’impose.
2) La croissance s’affaisse des deux côtés de l’Atlantique. Craignez-vous une répercussion dans les résultats des entreprises ?
La croissance ralentit en effet depuis le début de l’année mais surtout en Europe car elle reste solide aux USA. Plusieurs points d’explications : la mise en place de barrières tarifaires aux Etats-Unis pourrait relancer l’inflation et empêcher la banque centrale américaine de baisser ses taux courts. La situation en Ukraine reste un poids sur les budgets européens pour soutenir l’effort de guerre. Enfin la situation en Chine est toujours compliquée avec un secteur immobilier en crise et une consommation qui ralentit. En Europe désormais, on attend pour 2025 à une légère baisse des bénéfices par actions des entreprises cotées (-1,5%). Aux Etats-Unis, les prévisions sont revues en baisse également mais les résultats devraient progresser de 9%. Pour 2026, cependant, les analystes prévoient un rebond marqué en Europe.
3) Vous êtes experts du stock picking. Comment déceler les pépites de demain ? Quels secteurs ou sociétés présentent actuellement les meilleurs potentiels de croissance ?
Une grande partie de notre activité consiste en effet à déceler les pépites de demain. C’est le fruit d’une analyse financière et extra-financière rigoureuse à partir de multiples sources tant externes qu’internes. Nous sommes toujours positifs sur le secteur de la technologie qui reste tiré par l’IA, la digitalisation et la cybersécurité (Nvidia, ASML, SAP). La défense et l’aéronautique offrent également des belles perspectives de croissance (Airbus). Le secteur des infrastructures (Siemens) avec le plan de relance budgétaire allemand, le plan de reconstruction de l’Ukraine (le secteur du bâtiment, Geberit)), l’électrification et le développement des datacenters recèle de belles opportunités (Schneider). Du côté des Midcaps qui sont peu chères, nous sommes notamment positifs sur Spie et ID Logistics, ou encore Givaudan.
4) Les cryptomonnaies, qui viennent d’être autorisées dans certains plans d’épargne US, deviennent-ils un outil de diversification à détenir ?
L’éligibilité des cryptomonnaies dans les plans d’épargne retraite marque un pas supplémentaire vers la reconnaissance institutionnelle de ces actifs numériques. Les cryptomonnaies présentent un potentiel de rendement et une exposition directe à la digitalisation croissante de l’économie.
Toutefois, ces avantages doivent être contrebalancés par des limites significatives. A ce jour, elles n’ont aucune valeur intrinsèque claire contrairement aux actions (dividendes) ou obligations (coupons). De plus, la réglementation encore incertaine, la liquidité variable selon les actifs et les risques opérationnels (cybersécurité, sécurité des plateformes, conservation des clés privées) constituent des freins majeurs. Elles ne doivent donc pas être perçues comme une solution miracle, mais comme un outil de diversification marginal, destiné à compléter – et non à remplacer – les classes d’actifs traditionnelles.
Dominique Villeroy de Galhau
Membre du Comité de Direction
