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Pourquoi la nouvelle mondialisation sera américaine
Ses groupies ont qualifié de « Woodstock de l’intelligence artificielle », la conférence annuelle que Nvidia organise pour l’élite américaine et mondiale de l’IA. Mais quels sont les contours et les activités de cette industrie ?
La capitalisation boursière américaine représente près des deux tiers de la capitalisation boursière mondiale. Et la part des « 7 magnifiques », dont les activités recouvrent en tout ou partie le domaine de l’IA, en représente le tiers. Les huit premières sociétés de cette activité sont toutes américaines : Amazon, Facebook/Meta, Google/Alphabet, IBM, Intel, Nvidia, Salesforce, et Microsoft dont la seule capitalisation boursière est supérieure à celle de la bourse de Paris.
Malgré l’importance de leur taille, elles sont de création relativement récente. On peut regrouper leurs activités en quatre grandes catégories. Il y a d’abord les modèles fondateurs d’IA (les Large Language Models, LLM), tels que GPT-4 qui a donné naissance le 23 mars 2023 au fulgurant Chat GPT d’Open AI ; les plates-formes de Cloud Computing qui abritent et traitent ces modèles et un grand nombre de leurs applications (dont les leaders sont Amazon, Google et Microsoft) ; les sociétés de hardware que sont les sociétés de semi-conducteurs comme Nvidia, dont les puces hypersophistiquées utilisées dans les activités d’IA ont une part de marché supérieure à 80% et les fabricants de serveurs comme Dell ; et enfin les applications de l’IA destinées aux firmes d’autres secteurs.
Selon Jamie Dimon, le patron de JP Morgan, la banque a recensé plus de 400 cas d’utilisation de l’IA générative, dans à peu près tous les secteurs, et notamment la santé, le commerce de détail, l’ensemble du secteur manufacturier. L’histoire de cette industrie révolutionnaire n’est pas un long fleuve tranquille. Elle n’a rien à envier à la dureté des développements industriels successifs du passé. Mais celle-ci est aujourd’hui exacerbée : par la guerre des talents que se livrent les sociétés de ce secteur hautement technologique, par les difficultés d’approvisionnement en composants, par la surconsommation d’électricité pour faire fonctionner les LLM, et enfin par les tentatives de régulation, voire de démembrement, des autorités de la concurrence.
L’histoire de cette nouvelle révolution industrielle ne fait que commencer si l’on en croit les estimations des acteurs à l’avant-garde de celle-ci quant à l’horizon de temps qui nous sépare du moment où l’intelligence artificielle aura dépassé l’intelligence humaine : demain pour certains, pas avant la fin du siècle ou même jamais pour d’autres.
Il est donc difficile de préjuger quelles activités de cette industrie généreront le plus de valeur. La catégorie des sociétés d’infrastructure, avec Alphabet, Amazon et Microsoft, semble aujourd’hui la mieux placée pour tirer son épingle du jeu, ne serait-ce que par les moyens considérables dont elles disposent : des milliards de données à leur disposition, des armées de chercheurs, des positions bien établies sinon dominantes, et des liquidités en extrême abondance.
Dans ces conditions, on voit mal aujourd’hui comment la nouvelle mondialisation, façonnée par l’intelligence artificielle, ne serait pas américaine.
Paris, Mai 2024
Bertrand Jacquillat
Vice-Président du Cercle des Economistes et Senior Advisor chez Tiepolo
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